Chers Gianni et Ch@rles,
Il y a quelques années déjà, j'avais écrit dans feue notre revue que bientôt, à défaut d'une assurance protection juridique vie privée, il faudrait prévoir une somme x dans le budget de chasse des titulaires, afin de payer un avocat, pour se défendre en cas de réclamations excessives pour dégâts de gibier, ou de pratiques anormales (comme celle dont vous êtes l'objet) troublant l'exercice normal et légitime du droit de chasse.
Hélas, je ne me trompais pas.
Dans le cas présent, même si celle permettant d'interdire l'accès au bois durant les 72 heures précédant une date de battue a disparu
, en général les cahiers des charges de location d'un territoire de chasse prévoient souvent une clause de ce type :
"
Droit de chasse et gestion des peuplements forestiers.
Les opérations et les travaux de toutes natures requis par l'installation, la conduite, la protection et l'exploitation des peuplements du massif forestier dont fait partie le lot loué s'effectueront sans que le locataire puisse s'y opposer ou réclamer une indemnité quelconque, une modification des clauses du cahier des charges, en particulier une réduction du loyer ou une résiliation du bail.", il ne faut néanmoins pas oublier que cela ne donne pas au propriétaire, ou à celui qui gère les bois : le DNF pour les bois publics, le droit de faire n’importe quoi, n’importe comment et n’importe quand, car la location d’un bien immobilier est également visée par ces dispositions du Code civil :
"
Art. 1719. Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée;
2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée;
3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.
Art. 1726. Si, au contraire, le locataire ou le fermier ont été troublés dans leur jouissance par suite d'une action concernant la propriété du fonds, ils ont droit à une diminution proportionnée sur le prix du bail à loyer ou à ferme, pourvu que le trouble et l'empêchement aient été dénoncés au propriétaire.
Art. 1728. Le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° D'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention;
2° De payer le prix du bail aux termes convenus."
Donc, si l’adjudicataire titulaire du droit de chasse ne peut s’opposer à l’exploitation des bois et forêts, le propriétaire ou son délégué doit cependant veiller à ce que celle-ci soit exécutée
de façon normale, soit selon les règles de l’art et en bon père de famille, sans léser manifestement les droits et intérêts du locataire.
Cela implique notamment que, dans un bois loué pour la chasse, il n’est pas normal que, quelle qu’en soit la raison (retard d’exécution des travaux, indisponibilité des ouvriers ou du matériel avant une date x, …), des travaux de broyage ou de débroussaillage soient exécutés 48 heures avant l’ouverture de la chasse, sauf si le moindre retard pourrait causer un préjudice irréparable au propriétaire, qui devrait en justifier,
Or, dégager des plantations à l’automne sous le prétexte de permettre leur croissance, alors que chacun sait que celle-ci se produit au printemps, voire en été, n’est pas conforme aux usages en la matière !
Il est d'ailleurs unanimement admis par les tribunaux qu'un propriétaire doit garantir à son locataire une jouissance normale et paisible du bien loué, selon l'usage pour lequel il a été loué.
A titre anecdotique, cela me rappelle une conversation que j'avais eue, il y a quelques années sur mon précédent territoire de chasse, avec un garde forestier qui venait de prendre ses fonctions, lequel se plaignait de son maigre salaire, tout en me faisant remarquer que les forestiers ne s'intéressaient bien à la chasse que lorsqu'ils étaient directement concernés...
Si ce n'était pas un appel du pied pour m'inciter à améliorer le salaire de ce brave homme, c'était vachement bien imité.
Comme j'avais décliné son "offre", contrairement à notre voisin
, il s'était hasardé à l'un ou l'autre harcèlement sans objet, avant de fort vite comprendre que persister dans son attitude pourrait lui amener quelques soucis...
Bien à vous,
C.